Après avoir tourné dimanche soir la page de ses douze ans à l'Elysée, Jacques Chirac prépare sa sortie avec la volonté de rester jusqu'à la fin un acteur engagé dans la campagne présidentielle.
C'est "avec beaucoup d'émotion" et en avouant aux Français qu'il les "aime" qu'il a annoncé qu'il ne se représentait pas à l'élection présidentielle, dans une allocution solennelle à la télévision.
Mais, au terme de plus de quarante ans d'une vie politique intense, le chef de l'Etat n'a manifesté aucune intention de devenir une sorte de pré-retraité à l'Elysée, cantonné au rôle de simple spectateur du combat électoral pour sa succession.
Un de ses derniers gestes politiques majeurs sera d'adouber ou non un candidat à la présidentielle. Son allocution de dimanche s'adressant à tous les Français, Jacques Chirac a choisi de ne pas désigner immédiatement son favori pour la présidentielle.
Dans l'entourage du chef de l'Etat, on a toutefois indiqué lundi qu'il exprimera "rapidement" ses "choix personnels" après l'annonce par le Conseil constitutionnel de la liste officielle des candidats, le 19 mars.
Son soutien au candidat de l'UMP fait peu de doute, ne serait-ce que pour ne pas encourir à nouveau l'accusation de trahir son camp. Le très chiraquien ministre délégué aux Relations avec le Parlement, Henri Cuq, a ainsi affirmé que M. Chirac appuiera Nicolas Sarkozy "avec beaucoup de force".
Le Premier ministre Dominique de Villepin, qui était l'un des derniers à ne pas avoir encore rallié le candidat de l'UMP, a annoncé lundi matin qu'il serait au côté de M. Sarkozy "dans la bataille" présidentielle.
Pour autant, le soutien de M. Chirac - s'il se concrétise - n'équivaudra pas à un blanc-seing. Dimanche, le président de la République a adressé plusieurs "messages" aux Français, les exhortant en premier lieu à rejeter le "poison" de "l'extrémisme", en quoi les concurrents socialistes et UDF de M. Sarkozy ont voulu voir un avertissement au ministre candidat, accusé d'appels du pied au FN.
M. Chirac a également tracé une feuille de route pour les candidats, avec autant de lignes jaunes à ne pas franchir, comme cet appel à ne "jamais brader notre modèle français" qui sonnait comme une mise en garde à Nicolas Sarkozy.
Même si la scène politique devait être exclusivement occupée par la lutte pour l'Elysée, M. Chirac a promis de travailler jusqu'au bout au service des Français. D'ici à la fin de son mandat, au plus tard le 16 mai à minuit, ce travailleur acharné devrait ainsi poursuivre ses activités, presque comme si de rien n'était, avec son lot d'audiences, d'inaugurations, de déplacements.
Il a encore un rendez-vous européen: le 25 mars à Berlin, les 27 vont célébrer le 50e anniversaire du Traité de Rome, une occasion peut-être pour ses pairs de lui faire leurs adieux.
Plusieurs visites sont aussi à l'étude: à Moscou à l'invitation du président russe Vladimir Poutine, au Maghreb ou au Proche-Orient.
Pour "l'après-Elysée", Jacques Chirac s'est engagé à "servir autrement" les Français, en continuant ses combats "pour la justice, pour le progrès, pour la paix".
Beaucoup le verraient volontiers suivre les pas de l'ancien vice-président américain Al Gore dans sa croisade pour sauver la planète ou s'engager dans des actions de solidarité avec les pays pauvres.
Des missions sans doute plus à sa mesure que le siège qui l'attend au Conseil constitutionnel, dont il deviendra membre de droit comme l'ancien président Valéry Giscard d'Estaing.
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