Abolition de la peine de mort: feu vert des ministres à la révision constitutionnelle

L'inscription de l'abolition de la peine de mort dans la Constitution, annoncée il y a un an par Jacques Chirac, a reçu mercredi le feu vert du Conseil des ministres, ce qui ouvre la voie au vote d'une loi, dans un climat apaisé, sur un sujet qui a longtemps divisé les Français.

Le Conseil des ministres a entériné le projet de loi présenté par le Garde des Sceaux, Pascal Clément, qui "affirme de façon solennelle l'attachement de la France au caractère inviolable de la vie humaine", selon le communiqué du Conseil.

"Cela interdira le rétablissement d'une peine inhumaine, qui ne saurait constituer un acte de justice", a déclaré le président Chirac.

Il a confirmé qu'après un examen du texte à l'Assemblée nationale et au Sénat, le Parlement dans son ensemble serait réuni en Congrès à Versailles "avant la fin des travaux parlementaires", soit d'ici à la fin février, pour voter l'inscription officielle de l'abolition dans la Constitution.

La peine de mort a été abolie en 1981 lors du premier septennat de François Mitterrand.

Son successeur à l'Elysée Jacques Chirac -- qui avait voté l'abolition il y a un quart de siècle-- avait annoncé le 3 janvier 2006 la révision de la Constitution afin de consacrer ce principe qui pouvait être annulé par une simple loi.

"Cela permettra aussi à la France de poursuivre son action en faveur de l'abolition universelle, alors que 78 pays appliquent encore ce châtiment", a ajouté mercredi M. Chirac.

Cette inscription constitutionnelle "est un acte très symbolique mais de forte portée", qui vient "couronner un long long chemin", a commenté Michel Taube, porte-parole de l'association Ensemble contre la peine de mort (ECPM).

"La France a mis près de deux siècles pour abolir la peine de mort, il y a eu six débats parlementaires depuis la Révolution et il a fallu encore plus d'une vingtaine d'années après l'abolition pour qu'une majorité de Français soit enfin hostile au rétablissement", a expliqué M. Taube à l'AFP.

Selon lui, les derniers sondages sur la question montrent qu'"un peu plus de 55%" de Français sont hostiles au rétablissement. "C'est un consensus léger mais un consensus quand même".

Michel Taube a rappelé que la révision constitutionnelle allait également permettre à la France de ratifier enfin une convention internationale, en l'occurrence "le protocole numéro deux du pacte international des droits civils et politiques de l'ONU".

En Europe, "à ce jour, seules la Pologne et la République tchèque n'ont pas ratifié cette convention (..) qui interdit la peine de mort en toutes circonstances, notamment en temps de guerre", selon le porte-parole de l'ECPM, qui va accueillir le 3è Congrès mondial contre la peine de mort à Paris du 1er au 3 février.

Outre celui sur l'abolition de la peine de mort, le Congrès du Parlement doit se réunir en vue d'entériner deux autres projets de loi constitutionnels: le statut pénal du chef de l'Etat et une loi relative au corps électoral néo-calédonien.

La semaine dernière, le président de l'Assemblée nationale, Jean-Louis Debré, avait indiqué que cette réunion du Congrès aurait lieu le 19 ou le 26 février.

Auparavant le texte sur l'interdiction de la peine de mort sera examiné à l'Assemblée du 30 janvier au 1er février. Au Sénat, son rapporteur sera le socialiste Robert Badinter, qui avait défendu l'abolition en tant que Garde des Sceaux en 1981.