Onze ministres, dont le premier d'entre eux François Fillon, chercheront aux législatives la "légitimité" du suffrage universel, alors même que la Ve République interdit le cumul des fonctions parlementaire et ministérielle.
Parmi les premières règles inscrites par le général de Gaulle dans la Constitution de 1958, celle du non cumul des fonctions parlementaire et ministérielle vise à renforcer la stabilité des gouvernements, rompant symboliquement avec l'instabilité des régimes parlementaires des IIIe et IVe République.
Nommé ministre, un parlementaire doit laisser son siège à son suppléant. S'il quitte le gouvernement avant la fin de la législature, il ne le récupère pas automatiquement mais doit se présenter à nouveau devant les électeurs lors d'une élection partielle.
En revanche le caractère présidentiel de la Ve permet au chef de l'Etat de choisir les ministres au Parlement ou en dehors, prérogative dont tous les présidents ont largement usé, depuis le général de Gaulle.
C'est le cas dans le gouvernement Fillon avec notamment Rachida Dati, magistrate qui n'a jamais brigué un mandat, ou Bernard Kouchner, qui s'est présenté aux élections nationales à plusieurs reprises sans jamais être élu.
Contrairement à l'un des principes du régime parlementaire, le poste de Premier ministre échappe lui aussi à toute règle. A trois reprises, des non parlementaires ont été nommés à Matignon. De Gaulle l'a fait le premier avec la nomination de son directeur de cabinet, Georges Pompidou en 1962.
Valéry Giscard D'Estaing suivit, en remplaçant Jacques Chirac démissionnaire par l'économiste Raymond Barre en août 1976. En choisissant l'ancien secrétaire général de l'Elysée, Dominique de Villepin, pour succéder à Jean-Pierre Raffarin le 31 mai 2005, M. Chirac a perpétué la tradition. Mais des ministres "technocrates" ont souvent choisi de se soumettre ensuite au suffrage des électeurs.
Premier ministre, M. Pompidou se présente ainsi pour la première fois au suffrage universel aux législatives de 1967 et est élu dans le Cantal. Plusieurs ministres ou collaborateurs de Mitterrand, passés d'abord par l'Elysée, comme Jean-Louis Bianco, Elisabeth Guigou et Ségolène Royal sont ensuite élus députés.
S'ils recherchent souvent la légitimité du suffrage universel avant de laisser leur siège à leur suppléant, les ministres ne sont pas pour autant obligés de démissionner en cas de défaite. Ce fut notamment le cas de Maurice Couve de Murville, ministre des Affaires étrangères, battu aux élections de 1967, resté en poste avant d'être finalement élu en 1968.
Mais Catherine Trautmann, ministre dans le premier gouvernement Rocard (mai 1988) n'avait pas été renommée dans le second (juin 1988) après sa défaite aux législatives.
Dès sa nomination à Matignon, François Fillon, a quant à lui affirmé que "sauf exception", les ministres devaient être choisis parmi les parlementaires. Onze des vingt ministres et secrétaires d'Etat de son gouvernement ont donc décidé d'aller comme lui "chercher (leur) légitimité" en se présentant aux législatives. Le Premier ministre a même érigé en règle le principe qu'ils devraient démissionner en cas de défaite, règle qu'il a promis de s'appliquer à lui-même.
D'après les sondages et les résultats obtenus par Nicolas Sarkozy à la présidentielle dans leurs circonscriptions, le risque paraît toutefois faible.
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